Rencontre : Atelier de philosophie plébéienne - Machination(s)


Gîte Le Closet, Fertans (17-19 gde rue, 25330)

Samedi 21mai 2022

Atelier de philosophie plébéienne

Atelier... cela veut dire un essai d’abandon de l’autorité du maître et de la posture d’élève au profit d’une tentative de production en commun.

Centre de Réflexion et de Documentation sur les Philosophies Plébéiennes de l’association « Voyons où la philo mène... »

Machination(s)

Argumentaire :

Entré dans un langage commun volontiers psychologisant, le signifiant « parano » fonctionnerait comme une carte-joker dégainée à tout-va, jetant le discrédit sur tout discours suspect d’en être porteur, mettant ainsi en relief, en révélation, son aspect « déraisonnable ».
Or, si la « parano » de la neo-vox populi post-médiatique de l’internet mobile des réseaux « sociaux » n’est pas – tout à fait – la paranoïa de la psychiatrie et/ou de la psychanalyse, elle en est, sans conteste, sa production mutante, « chose » polymorphe aux usages et vertus les plus multiples.
Depuis Deleuze et Guattari, nous savons combien capitalisme et schizophrénie se conjuguent ; mais avec la Matrix de l’ère numérique, comment articuler, penser les synthèses disjonctives – où s’entremêlent folie, complotismes, des « vérités alternatives » néofascistes aux pensées critiques, aux gestes subversifs et créatifs ?
Pour vivre un tant soit peu ces questions, il nous faut nous risquer, nous prendre et nous perdre au jeu de la machination, de la machinaction parano, interroger ses puissances : comment ça marche, ça parle, bégaie et délire le monde ? Qu’est-ce que ça nous fait et qu’est-ce que ça produit ?

9h Accueil

9h15-10h45 « Sous le lac, dans les nuages, et sur les lèvres (quasi una fantasia) » Marco Candore
« Un labyrinthe est dit multiple, étymologiquement, parce qu’il a beaucoup de plis. Le multiple, ce n’est pas seulement ce qui a beaucoup de parties, mais ce qui est plié de beaucoup de façons. » (Deleuze, Le Pli)
Les Mille et une nuits, tu connais ? Oui bien sûr tu connais, enfin t’as entendu causer quoi, mais me dis pas que tu l’as lu : arrête de mentir, personne ne lit ça, c’est un peu comme pour Don Quichotte ou Ulysse (l’Irlandais, pas le Grec). Nan j’déconne. Mais quand même Les Mille et une nuits, le labyrinthe, What’s The Fuck (WTF pour les Geeks), tu te dis hein, c’est quoi le rapport avec la parano-paranoïa-paranoïaque, Dub-Dubon-Dubonnet ? Tu as raison, ça saute pas à la gueule.
Bon. Reprenons donc mon escalier d’esprit en escalier tordu torsadé de l’escaliesprit façon Escher : le labyrinthe, la bibliothèque, le livre-bibliothèque, le livre-rhizome (Mille Plateaux, tu commences à faire le focus ?), les récits enchâssés ou en réseaux, Babel-Borges, Le Nom de la Rose et le vieux Jorge & tutti frutti, ouh la. Dans le bouquin d’Umberto Eco, tu te souviens de l’embrouille avec le rire ? voilà, ayé, l’ascenseur est (presque) arrivé – mais où ? Ascenseur horizontal et vertical tout à la fois, et plus encore : vertigonal.
Car, « comment faire rire un paranoïaque » (dixit François Roustang) ?
Allez embarque en nomade, pour un voyage en paréidolie et apophénie, avec cornet-surprise pop : on va se faire un de ces cinoches !

11h-12h30 « Berbiguier : deux cents ans de paranoïa » Adam Pašek
Publié en 1821 à compte d’auteur, Farfadets ou tous les démons ne sont pas de ce monde est une chronique autobiographique d’une lutte acharnée entre Berbiguier, héros mi-Quichotte, mi-Rousseau, et une multitude d’agents infernaux. Enrôlés dans une armée diabolique dirigée depuis le monde sous la terre par le terrible Rhotomago, les hommes méchants deviennent farfadets, obtenant un large éventail de pouvoirs surnaturels qu’ils utilisent pour persécuter les bons chrétiens, humbles sujets de la monarchie restaurée.
Ayant découvert leur conspiration (immense privilège dont il se flatte), Berbiguier décide d’écrire un mémoire sur son combat, afin de dénoncer les farfadets aux yeux du monde et d’avertir les souverains chrétiens de la guerre en cours. Ce dessein exacerbe naturellement les exactions des diablotins exaspérés par la menace. Désormais, un piège est tendu à chacun des pas de l’écrivain. Invisibles, les farfadets s’introduisent dans son tabac à priser. Passe-murailles, ils subtilisent ses effets personnels. Impudiques, ils vont jusqu’à se glisser sous sa couette…
Mais le « vrai » fou dans cette histoire n’est-il pas le lecteur lui-même ?

Apéro puis repas

15h - 16h30 « Quelles sont les différences de méthodes entre les théoriciens du complot et les sciences sociales » Thierry Brugvin
Les scientifiques et les économistes marxistes sont eux aussi parfois accusés de complotisme lorsqu’ils dénoncent l’exploitation et la domination cachée des classes populaires. Il s’agit en réalité de faits sociaux non exprimés par certains médias et politiciens de droite. Les marxistes révèlent simplement que c’est essentiellement l’économie et les structures du capitalisme, qui déterminent l’évolution du monde actuel et non les individus, tels les élites capitalistes et politiques. Les théoriciens du complot pensent l’inverse. Mais qu’est ce véritablement qu’un complotiste au-delà de l’anathème utilisé pour faire taire son adversaire ? Qu’est ce qui le différencie d’un paranoïaque ou d’un néofasciste ? Comment différencier le vrai du faux, un fake ou d’une vérité scientifique ? Pour être reconnu comme réel par l’opinion publique, on peut distinguer plusieurs niveaux dans la reconnaissance d’un fait par l’opinion publique, qui vont de la rumeur énoncée par un individu, à des faits reconnus par les scientifiques, mais aussi les tribunaux et les médias.

17h - 18h30 « Schizophréniser la paranoïa ? » Anne Querrien
En tissant les réflexions sur la paranoïa de Jacques Lacan dans sa thèse de médecine et de Deleuze et Guattari dans L’Anti-Œdipe, on examinera à quelles conditions le délire paranoïaque peut s’investir dans une création, dans une relation d’objet, et échapper à la posture d’arraisonnement de l’autre à sa propre vérité.
On s’appuiera sur les exemples de Salvador Dali et de l’art brut, peut-être aussi de Bacon.
Cette modification d’orientation est-elle possible hors milieu de vie dédié ?
Une écologie sociale créatrice de nouvelles relations entre des gens formant des réseaux d’interconnaissances et de luttes peut-elle se développer dans les conditions de vie métropolitaines et donner à tout un chacun les moyens de se défaire des liens paranoïsants ?
L’obsession d’améliorer sa place dans la hiérarchie relève-t-elle de la paranoïa, et peut-elle se soigner par la création ?
Comment schizophréniser la paranoïa ?

19h Apéro puis repas

Inscription obligatoire avant le samedi 14 mai

Tarif de la journée (interventions + repas midi, boissons comprises) : 35 € (25 € chômeurs, étudiants). Sans le repas du midi : 15 € par demi-journée.

Possibilité d’hébergement au gîte "Le closet" de Fertans. Repas du soir au gîte : 10 €. Nuitée du samedi : 20€. Week-end complet (avec repas et nuitée du vendredi soir) : 85 €.

Inscription et renseignements :
crdpp25@gmail.com ou Philippe Roy 06 51 38 43 45 http://reseau.philoplebe.lautre.net/